RÉSUMÉ:
Seize temps noirs pour apprendre à dire kuei raconte ces moments et ces gestes dont on ne parle pas et qui pourtant illustrent les proximités et les solidarités entre les communautés noires et autochtones au Québec. Histoire, scènes, archives se recoupent, se répètent en seize fragments, comme autant d'improvisations musicales, pour réimaginer à partir d'une perspective noire, l'histoire et les possibilités de la rencontre des peuples au-delà de la violence coloniale.
Les brèches et les fissures, les gestes militants et les imaginations radicales se déplacent, se replacent, se recomposent, s'ajustent. Quelle sera leur texture ?
L'AUTEUR:
Philippe Néméh-Nombré est sociologue et chercheur en études noires. Ses recherches portent sur les possibilités de relations entre les perspectives libératrices noires et autochtones, sur les méthodologies critiques, ainsi que sur les écologies noires. Il est également vice-président de la Ligue des droits et libertés, et siège au comité de rédaction de la revue Liberté.
EXTRAIT:
Comme Palma Disco je veux accélérer ou ralentir la radicalité noire pour atteindre 110 ou 120 ou 130 bpm, arriver là où
elle pourrait rejoindre les brèches décoloniales, là où elle pourrait dire kuei. La modernité occidentale, comme le monde
qu'elle continue de créer sur le continent qu'elle a appelé l'Amérique, doit son existence à la production de l'abjection
noire et à la production de l'absence autochtone. J'occupe et suis occupé par la première de ces productions. Et je veux
tendre, là où je suis, vers celles et ceux qui occupent et sont occupés par la seconde, pour devenir ensemble en excès
de ce qui nous occupe. Seize temps, c'est-à-dire seize tentatives, interruptions, invitations et erreurs pour proposer
quelque chose comme des possibilités de relations libératrices et décoloniales noires et autochtones au Québec.
PRESSE:
Il est des essais dont on voudrait, pour les respecter, imiter le rythme, calquer la syntaxe, voire copier la silhouette des paragraphes: sans les plagier, il s'agirait plutôt d'en prolonger l'écriture, de donner à voir les échos entre une pensée et une autre, le plaisir discret d'une rencontre par le livre.
- Renato Rodriguez-Lefebvre, Spirale
Pour son édition hivernale, la revue Relations s'intéresse aux approches dites alternatives, complémentaires et globales de la santé. Depuis quelques mois, la pandémie de COVID-19 révèle l'importance tout comme les déficiences de notre système de santé fondé sur l'approche biomédicale. Elle révèle aussi à quel point la santé n'est pas que l'absence de maladie, mais bien un état global de la personne résultant d'un ensemble de conditions et de relations humaines. Sous l'impulsion des mouvements féministe, communautaire et écologique, entre autres, ces approches ouvrent des voies pour repenser notre façon de considérer la santé et la maladie et transformer nos systèmes de soins afin de les rendre plus inclusifs et sensibles aux besoins des personnes. Aussi au sommaire, un débat sur le pouvoir de la parole entre Valérie Lefebvre-Faucher et Philippe Néméh-Nombré et le texte gagnant du Concours Jeunes voix engagées par Sophie Marois. (source : Relations)
À un moment où les crispations identitaires se multiplient, à travers des discours qui deviennent lois, nous exigeons des citoyen·nes de ce monde d'avoir une vision fixe et définitive de leur identité - comme si celle-ci n'était pas foncièrement poreuse. Nous nous questionnons, dans ce numéro dirigé par Lorrie Jean-Louis, sur l'américanité à partir de l'héritage et des trajectoires caribéennes en tenant compte du sombre legs de la colonisation et de l'esclavage transatlantique. Nous avons voulu déplacer, comme nous l'avions fait il y a deux ans dans notre numéro «Premiers Peuples: cartographie d'une libération», la marge vers le centre.
Nous n'avons évidemment pas la prétention de présenter dans ce numéro un portrait exhaustif de la Caraïbe. Il s'agit, au mieux, d'un certain regard sur les multiplicités rayonnantes de la Caraïbe. Et surtout, il s'agit, nous l'espérons, du début d'un dialogue, d'une réflexion qui se poursuivra à travers nos publications futures.
Le soixantième anniversaire de Liberté nous apparaît comme un excellent prétexte pour faire, à notre manière, une radiographie du débat d'idées au Québec, tout en revisitant l'héritage intellectuel et littéraire qui s'est constitué dans nos pages, au fil du temps. Ce numéro, le premier de deux volumes, présente un aspect non définitif. Nous tentons de traduire un mouvement, d'amorcer un dialogue. Si, au départ, nous voulions réfléchir à la question des gains et des pertes, le déploiement des textes brouille largement ces catégories, en renégociant l'histoire suivant des axes multiples. Nous réinterrogeons et recontextualisons continuellement le lieu d'où l'on parle. Ainsi, la revue elle-même n'est pas le point focal des réflexions proposées ici, mais elle apparaît en quelque sorte comme une maison, comme un espace d'exception et de contagion, un lieu de relais, où les générations se succèdent. Toujours, nous nous posons cette question : comment l'habiter, cette maison, et avec qui ? Qui manque à l'appel, qui n'est pas encore arrivé ?
Quels combats ont abouti, et lesquels se sont enlisés, ont été abandonnés en cours de route ? Les paramètres de la lutte ont-ils changé et si oui, comment ? Ces questionnements sont à déployer autant sur le terrain de l'art que sur celui du politique. Si l'on regarde dans notre rétroviseur, on remarque que toutes les revendications exprimées à travers la société n'ont pas été considérées avec le même sérieux, au fil du temps. Comment éclairer ces angles morts ? Peut-être réussissons-nous somme toute mieux à faire résonner les voix, à faire parler les marges ?
Ce numéro de la revue Liberté est né à la fois d'un hasard et d'une évidence. Le hasard, d'abord : au plus creux du confinement de l'hiver 2021, deux collaborateurs ont proposé, coup sur coup et sans se consulter, des textes portant sur les conditions de vie et le traitement des personnes vieillissantes et en perte d'autonomie depuis le début de la pandémie. Ensuite, l'évidence : après l'hécatombe causée en CHSLD et dans les résidences privées par la COVID-19, il a semblé à l'équipe de la revue incontournable de réfléchir à la place des aîné.e.s dans notre société. Quel espace de parole et d'existence leur réserve-t-on ? Tentons-nous réellement de les inclure au dialogue entre les générations ? Pourquoi existe-t-il un pareil tabou entourant les inévitables effets du temps sur le corps ? Dans ce dossier, il s'agira d'interroger la violence d'une organisation sociale qui, pour fonctionner, a choisi d'exclure une partie de sa population. Qu'est-ce que ce triste constat révèle de notre société ? (source : Liberté)