Partout dans le monde, les manifestations pour le climat mettant les jeunes à l'avant-scène se multiplient. Les enfants prennent les devants, s'organisent, refusent d'assister passivement à la liquidation programmée de leur avenir. Curieusement - ou alors est-ce un signe des temps ? -, on a observé, au cours des dernières années, une mobilisation similaire, mais à plus petite échelle, chez les adolescents de Parkland, en Floride, engagés dans la lutte pour le contrôle des armes à feu aux États-Unis après une tuerie dans leur école secondaire. Les jeunes manifestants pour le climat, tout comme les élèves de Parkland avant eux, ne sont en fait pas tant des militants que des citoyens qui agissent et qui réclament le droit d'exercer pleinement leurs libertés civiles, même avant d'avoir atteint l'âge de la majorité légale. Alors qu'ils s'imposent aujourd'hui comme une force politique majeure, on voit s'exprimer un malaise, comme si ceux qui, parmi les adultes, détiennent le pouvoir avaient du mal à admettre la légitimité d'un discours porté par des individus qu'on a l'habitude d'encadrer, d'éduquer, de soigner, mais aussi de contraindre, de limiter, de contrôler. Que signifie donc ce refus de concevoir l'enfant comme un sujet politique ?
À mesure que la ville est accaparée par les intérêts immobiliers et que le territoire est grignoté par un étalement urbain hors de contrôle, le ciel, c'est l'idée toute simple à l'origine de ce dossier, disparaît. La ville se densifie. L'accès à la nature se complexifie. Nous sommes de plus en plus nombreux à vivre enclavés, privés de la possibilité même de contempler l'horizon, de laisser notre regard se perdre dans l'immensité. La disparition du ciel, c'est aussi l'effritement de notre rapport au mystère, à l'impalpable, voire au sacré. Quelles formes de spiritualité cultive-t-on aujourd'hui ? Notre vie intérieure, notre imaginaire, sont-ils aussi étroits que les espaces que nous habitons ? Nous nous sommes affranchis, et tant mieux, des dogmes imposés par la religion, mais il semble parfois que notre capacité à estimer la valeur de l'immatériel, de ce qui ne peut pas être saisi et quantifié, s'est émoussée.
Au printemps 2020, lorsque nous nous sommes tous, sans exception mais dans des conditions fort inégalitaires, retrouvés pris entre quatre murs, la disparition du ciel a soudain acquis un sens très concret, pressant, nous incitant à réévaluer nos manières de vivre et de concevoir le monde. La disparition du ciel désigne aussi, et peut-être même avant tout, ce blocage de notre horizon symbolique et politique. Nous avons apprécié la lenteur amenée par le confinement, et durant nos marches quotidiennes nous avons beaucoup regardé le ciel, presque un ciel de campagne tellement il était cristallin. L'air était bon, le silence était clair. Alors que la vie reprend son cours, n'oublions pas de lever les yeux au ciel, et demandons-nous comment y projeter, enfin, des rêves plus justes et plus porteurs.
Cette édition de la revue Liberté se penche sur le sport ! Haut lieu de la dynamique économique capitaliste et des rapports de domination, véhicule de violence, mais aussi vecteur de résistance à ces dynamiques mêmes, de solidarité et de plaisir tout simplement, l'univers sportif porte à la réflexion. C'est empreint de l'esprit d'équipe (sportive), que les textes du dossier sont exceptionnellement signés par des membres du comité éditorial. Michel Nareau y réfléchit au baseball amateur comme vecteur de mixité sociale, Aurélie Lanctôt s'intéresse à l'histoire de Yusra Mardini, nageuse syrienne membre de la première délégation de réfugiés aux Olympiques, Philippe Néméh-Nombré s'entretient avec Lilian Thuram, Lorrie Jean-Louis parle de sa pratique de la capoeira et Alexandre Fontaine-Rousseau et Rosalie Lavoie signent une bande-dessinée sur la vie d'aréna. Lisez aussi un entretien avec Maxime Raymond Bock sur Morel et les bâtisseurs des villes et un reportage de Louis Hamelin en expédition sur la Côte-Nord.
Cet automne, Liberté présente un dossier sur les drogues. Après la légalisation du cannabis et la création d'une nouvelle société d'État qui vend du pot, après que l'alcool a été officiellement déclaré « service essentiel », et étant donné la prescription croissante de psychotropes, même pour les enfants, pouvons-nous dire que nous sommes tous drogués? Sommes-nous en voie de devenir tous et toutes super cools et connecté.e.s avec l'univers? Ou est-ce que cette consommation nous fait simplement tolérer plus longtemps l'intolérable? Et qui profite de ces nouveaux usages banalisés? Réfléchir aux drogues aujourd'hui nous amène forcément à parler de détresse et de pauvreté, de rapports coloniaux et de mainmise sur le savoir, mais aussi de notre recherche de la joie, du rire et du mystère. Outre ce dossier spécial, ce numéro comprend notamment un entretien avec la grande écrivaine Yanick Lahens. (source : Liberté)
Cet hiver, la revue Liberté propose un dossier sur la naissance dans un angle philosophique, historique, theorique. La facon dont est traitée et perçue la naissance a deja change plusieurs fois, elle change et changera encore. Comment nait-on aujourd'hui ? Qu'est-ce que naitre, au juste ? Et comment serait un monde qui accorde la plus haute importance a la naissance, quelle societe pourrait en naitre ? C'est a partir de ces interrogations que les collaborateur·rices de ce numéro vous invitent a lire le present dossier. Également au sommaire, un état des lieux de l'autofiction par Karine Rosso, un essai sur la DPJ et la notion de négligence du point de vue des enfants par Laurence Ricard et un essai sur la façon dont la maladie influe sur le rapport au monde et les relations interpersonnelles par Pascale Millot, entre autres.
Cet été, la revue Liberté s'intéresse à la forêt. « Nous proposons ici d'observer la forêt de l'intérieur; de renverser les images de cartes postales qui, toujours, présentent la forêt en surplomb, comme une chose que le regard humain peut englober, régir. Il s'agira plutôt dans ce dossier de visiter la forêt, de s'imprégner de son imaginaire, de son relief, de sa complexité, afin d'apprendre à mieux habiter notre monde. » (extrait de la présentation). Dans ce dossier, lisez Marie-Andrée Gill sur l'immensité du paysage ancestral, Dalie Giroux et Amélie-Anne Mailhot sur l'apprentissage de la vie en forêt, Alejandra Zaga Mendez sur la gestion collective comme lieu d'une résistance, Philippe Néméh-Nombré et Yannick Nombré sur la forêt dans l'histoire du marronnage, Jean-François Nadeau sur notre relation avec le loup, ainsi qu'un entretien avec l'anthropologue Eduardo Kohn. Hors du dossier, retrouvez les essais de Camille Toffoli sur la crise du logement et de Michel Lacroix sur l'école. (source : Liberté)
Le soixantième anniversaire de Liberté nous apparaît comme un excellent prétexte pour faire, à notre manière, une radiographie du débat d'idées au Québec, tout en revisitant l'héritage intellectuel et littéraire qui s'est constitué dans nos pages, au fil du temps. Ce numéro, le premier de deux volumes, présente un aspect non définitif. Nous tentons de traduire un mouvement, d'amorcer un dialogue. Si, au départ, nous voulions réfléchir à la question des gains et des pertes, le déploiement des textes brouille largement ces catégories, en renégociant l'histoire suivant des axes multiples. Nous réinterrogeons et recontextualisons continuellement le lieu d'où l'on parle. Ainsi, la revue elle-même n'est pas le point focal des réflexions proposées ici, mais elle apparaît en quelque sorte comme une maison, comme un espace d'exception et de contagion, un lieu de relais, où les générations se succèdent. Toujours, nous nous posons cette question : comment l'habiter, cette maison, et avec qui ? Qui manque à l'appel, qui n'est pas encore arrivé ?
Quels combats ont abouti, et lesquels se sont enlisés, ont été abandonnés en cours de route ? Les paramètres de la lutte ont-ils changé et si oui, comment ? Ces questionnements sont à déployer autant sur le terrain de l'art que sur celui du politique. Si l'on regarde dans notre rétroviseur, on remarque que toutes les revendications exprimées à travers la société n'ont pas été considérées avec le même sérieux, au fil du temps. Comment éclairer ces angles morts ? Peut-être réussissons-nous somme toute mieux à faire résonner les voix, à faire parler les marges ?
Ce numéro de la revue Liberté est né à la fois d'un hasard et d'une évidence. Le hasard, d'abord : au plus creux du confinement de l'hiver 2021, deux collaborateurs ont proposé, coup sur coup et sans se consulter, des textes portant sur les conditions de vie et le traitement des personnes vieillissantes et en perte d'autonomie depuis le début de la pandémie. Ensuite, l'évidence : après l'hécatombe causée en CHSLD et dans les résidences privées par la COVID-19, il a semblé à l'équipe de la revue incontournable de réfléchir à la place des aîné.e.s dans notre société. Quel espace de parole et d'existence leur réserve-t-on ? Tentons-nous réellement de les inclure au dialogue entre les générations ? Pourquoi existe-t-il un pareil tabou entourant les inévitables effets du temps sur le corps ? Dans ce dossier, il s'agira d'interroger la violence d'une organisation sociale qui, pour fonctionner, a choisi d'exclure une partie de sa population. Qu'est-ce que ce triste constat révèle de notre société ? (source : Liberté)
Ici, les textes tentent, chacun à leur manière, de détricoter des mythes, de troubler les grands récits et de sonder les figures héroïques qui font la trame de notre histoire. Qu'annonçaient ces oeuvres, ces mouvements, ces grandes idées et ces personnages qu'on a érigés au rang d'idéal, placés en surplomb de la société ? Qu'est-ce que leur traversée du temps dit de nous, aujourd'hui ?
Mais pourquoi, demanderez-vous, personnaliser cette question, en parlant de « déroute des héros » comme on déboulonne des statues ? N'a-t-on pas déjà renoncé à quelque chose lorsqu'on chasse le spectre de ceux et celles (surtout ceux, car nous avons la mémoire bien sélective) qui nous ont si longtemps inspirés ? La « déroute des héros » désigne en fait un phénomène plus vaste. Quelque chose comme un déplacement ; une tentative d'éclairer les angles morts qui, peut-être, nous ont longtemps empêchés de voir que ce que nous tenions pour extraordinaire travaillait en fait contre nous, contre le rêve de justice et de liberté pour le plus grand nombre possible. Il ne s'agit pas de répudier un héritage ni d'affirmer que nous ne croyons plus à rien, que rien dans notre passé ne mérite d'être défendu. Cela témoigne plutôt de la fin de la naïveté.
Nous proposons qu'il soit encore possible de faire autre chose que danser autour du brasier. Réfléchissons ensemble, rassemblons-nous, écrivons pour échapper à la déprime des temps, à sa terrible uniformisation ; faisons preuve d'imagination et de courage politique, et tentons l'impossible, puisqu'il y a devant nous un défi immense, ce que nous rappellent
les adolescents qui descendent dans la rue les vendredis. La déroute des héros désigne l'urgence de retrouver l'essentiel : cette impulsion qui se passe d'héroïsme, qui ne mise pas sur la grandeur des individus ou des mythes, mais sur la mise en commun des espérances.
Dans cette édition hivernale, la revue Liberté s'intéresse à l'enfermement qui « comme logique et comme relation, n'a pas de murs. » « Si la prison en est l'élément central, si elle représente la forme la plus visible et tangible de l'enfermement à l'intérieur de nos sociétés, elle ne témoigne pas, à elle seule, de ce que l'on pourrait appeler l'organisation carcérale de l'espace et du temps. Dans ce dossier, nous proposons d'explorer les lieux et les moments de l'enfermement. Comment apprendre à connaître et reconnaître les " géographies de l'enfermement " telles qu'elles se déploient ici et maintenant, afin de mieux les défaire dans l'avenir ? » (Liberté) Lisez les réflexions de Rémy-Paulin Twahirwa, Tommaso Manfredini, Camille Bonenfant & Catherine Lavoie-Marcus, Lucie Lemonde, Louise Henry et Anne-Marie Boucher. Hors-dossier, retrouvez entre autres un reportage de Frédérick Lavoie en Inde, Félix L. Deslauriers sur l'héritage du lesbianisme matérialiste et deux nouvelles chroniques, l'une par Dalie Giroux et l'autre par Nicolas Lévesque.
Il est de plus en plus clair, à mesure que se généralise la prise en charge par les algorithmes de nos rapports sociaux, que ces technologies - du moins, dans le cadre qui prévaut aujourd'hui - contournent l'exercice démocratique. On pose parfois sur elles un regard apolitique, puisqu'on ne comprend pas bien leurs rouages. Mais les algorithmes font des choix pour nous, ils trient l'information, formulent des prédictions de façon si opaque et mystérieuse aux yeux de la majorité que le processus s'en trouve naturalisé. « Si la machine le dit... » Ainsi, nous apprenons à conjuguer avec les résultats des calculs algorithmiques sans se trop se demander ce qui se passe derrière le rideau, ou plutôt derrière l'écran. Les rouages intimes de l'algorithme nous échappent. Nous n'avons pas eu le temps de réfléchir aux implications sociales de la délégation aux algorithmes d'un nombre croissant de tâches et de responsabilités humaines. La technologie nous a dépassés en un claquement de doigt. Mais ce faisant, nous apprêtons-nous à renoncer à l'exercice politique lui-même, en succombant aux chimères de la rationalité technoscientifique, qui prétend pouvoir résoudre toutes les tensions, tous les conflits ?