La vie du Père Joseph (1577-1638), surnommé par ses détracteurs « l'éminence grise du cardinal de Richelieu » dont il était ministre, est un saisissant paradoxe.
Le jour, ce chef de redoutables services spéciaux dirige les opérations sur le champ de bataille. Son exercice impitoyable du pouvoir réussit à prolonger les horreurs de la guerre de Trente Ans.
La nuit, ce fondateur d'un ordre de religieuses contemplatives prie ou compose des poèmes.
Pourquoi Aldous Huxley, le romancier de Contrepoint et du Meilleur des Mondes, s'est-il fait le biographe de ce prodigieux méconnu, mélange de Talleyrand et de saint Jean de la Croix ?
Parce que, dit-il, « la création d'un tel homme dépasserait le génie de n'importe quel artiste littéraire ». Certainement aussi parce que le Père Joseph, politicien mystique, s'est vu, le jour comme la nuit, en bâtisseur d'un monde meilleur...
Ils ont donné deux reines à la France, deux papes à la Chrétienté... et Florence leur doit ses heures les plus glorieuses. Princes prodigieusement populaires, riches et puissants, grands mécènes, les Médicis ont durablement marqué leur temps.
Depuis l'avènement de Côme l'Ancien, le « Père de la patrie », au début du XVe siècle, jusqu'à l'extinction de la lignée avec la mort de Jean-Gaston en 1737, leur histoire n'est que révoltes, exils, assassinats, trahisons, jeux de pouvoirs et amours violentes...
Digne des meilleurs romans, elle inspire la verve de l'historien Dumas. Et l'histoire selon Dumas est une histoire où le sang coule, des complots se trament, des têtes tombent...
La troisième édition d'un ouvrage plebiscité par la critique
"Des destinées saturées de sang et de sexe, au nom de Dieu, du pouvoir ou de l'art... De quoi chatouiller la plume docte et bondissante de l'auteur des Mousquetaires. Un livre à offrir à tous les passionnés d'histoire, d'ingénieuses manoeuvres politiques, d'art et de ragots !" - (Le Point)
"Cette chronique des Médicis et de leur influence sur les arts prend la forme d'une fresque que Dumas, guide intarissable, nous fait visiter au pas de course. Le lecteur et étourdi et ravi. Une belle redécouverte." - (L'Obs)
"L'ouvrage le plus intelligent et le plus vif jamais écrit sur cette famille." - (Dominique Fernandez, Académicien)
Suivre « pas à pas » et « avec franchise » toute la série de ses études : c'est précisément ce que Vico (1668-1744) se proposait de faire dans son autobiographie Vie de Giambattista Vico écrite par lui-même, parue en 1728.
Mais, parce que placée dans la perspective de la polémique contre la diffusion du cartésianisme à Naples, cette reconstruction a posteriori eut pour effet de léguer une image du penseur toute orientée vers un but : la conception de la Science nouvelle.
Rompant avec cette artificielle perspective, Raffaele Ruggiero raconte une autre histoire de Vico. Il rend leur pleine autonomie à toutes les expériences intellectuelles du savant penseur : sa formation, ses études juridiques, son engagement littéraire, son invention d'une nouvelle rhétorique de la science. Il révèle la multiplicité des inspirations culturelles qui ont façonné sa physionomie unique de philosophe et d'écrivain, et l'articulation complexe de ses intérêts scientifiques destinés à remodeler l'encyclopédie des savoirs à l'aube de la modernité.
Convoquant toutes ses oeuvres, le replaçant dans son contexte, celui d'un protagoniste de la République des Lettres à l'époque des Lumières, Raffaele Ruggiero expose le rapport ambigu et passionnant de Vico à ses sources et à ses fantômes polémiques.
Les charlatans sont, sans aucun doute, l'une des figures les plus populaires et intéressantes de la Renaissance. Matteo Leta en offre un portrait : aspect physique, langage, lieux qu'ils fréquentent, marchandises qu'ils colportent et victimes qu'ils trompent. Grâce à une rigoureuse analyse des sources littéraires italiennes et françaises, en particulier comédies et nouvelles, il montre toute la porosité des charlatans, dont l'imaginaire s'imbrique à celui des valets à tout faire, des magiciens bonimenteurs et des sorcières entremetteuses qui peuplent la littérature de l'époque. Leurs prouesses et fantasmagories verbales sont évoquées pour cacher d'invraisemblables ruses magiques et médicales ou pour en faire des contrepoints satyriques du pédantisme académique. Trompeurs (parfois) trompés, les charlatans se révèlent également des orateurs chevronnés, comédiens experts et guérisseurs capables de véritables prodiges. Ainsi, ce n'est pas un hasard si plusieurs écrivains ont recours à l'imaginaire charlatanesque pour raviver des polémiques (littéraires, religieuses, ou politiques), ou pour décrire des aspects particuliers de l'altérité ethnique. Trois éminents spécialistes de la Renaissance - Jean Céard, Denis Crouzet et Frank Lestringant - enrichissent ce volume de leurs précieuses introductions.
Ce livre présente les processus de racialisation qui ont ponctué la transformation de l'Europe et de ses colonies de la fin du Moyen Âge à l'âge des révolutions. Cette histoire éclaire l'évolution des sociétés, des institutions, des cultures et des théories. Elle décrit la volonté de catégoriser les individus et les groupes, de les enclore dans des identités présentées comme intangibles, de discriminer les collectifs dominés, voire d'organiser l'oppression à grand échelle contre des populations définies par leur race. La racialisation procède par naturalisation des rapports sociaux et des caractères physiques et moraux qui se transmettent de génération en génération, à travers la procréation. Elle repose sur une contradiction : le racisme affirme que les gens sont prisonniers de leur race et s'emploie néanmoins à gérer la transformation des races. Quatre coups de projecteur permettent de rendre compte de cette histoire : la noblesse de naissance face à l'anoblissement, la nature juive ou musulmane qui persiste dans le sang des convertis, l'origine ineffaçable des métis dans l'Amérique coloniale, la déshumanisation des Africains par la traite esclavagiste. Ces phénomènes sont les expériences séculaires sur lesquelles les auteurs des Lumières se sont fondés pour classer l'humanité en races. Ils hiérarchisent les groupes humains mais proclament aussi l'universalité des droits de l'homme. Le siècle des philosophes peut alors se lire comme le fruit d'une histoire passée, autant que comme le fondement d'une histoire inachevée, la nôtre.
Le trois-mâts Bounty fait route vers l'Angleterre après avoir embarqué à Tahiti des plants d'arbres à pain quand, un matin d'avril 1789, le jeune officier Fletcher Christian - entraînant avec lui une partie de l'équipage - s'empare du commandement et abandonne dans une chaloupe au large des îles de la Société son capitaine William Bligh et dix-huit matelots avec cinq jours de vivres. Bligh navigue quarante-trois jours avant d'aborder dans l'île de Timor, se révélant un remarquable meneur d'hommes et un excellent navigateur. La justice entre alors en action, mais ne saisit à Tahiti qu'un certain nombre des mutins. Christian et neuf autres ont disparu avec le Bounty. L'énigme de leur sort ne se résout que par la découverte en 1808 de la communauté de l'île de Pitcairn. Les raisons de la rébellion, l'odyssée de Bligh (qui finira amiral et mourra en 1817 à soixante-trois ans), la tragique ou l'étonnante destinée des mutins, c'est ce que relate Sir John Barrow d'après les archives du procès et ses propres recherches dans ce récit publié en 1831, à la fois authentique et passionnant, d'une des plus célèbres mutineries de la marine anglaise.
Le nom de Sir John Barrow a été donné à une pointe, un cap et un détroit en hommage à ce grand voyageur et géographe anglais, né en 1764 près d'Ulverston dans le Lancashire. Comme secrétaire de Lord George MacArtney, il l'a accompagné dans des missions en Chine et en Afrique du Sud. Devenu en 1804 sous-secrétaire d'État à la Marine, poste qu'il conservera quarante ans, il organise des expéditions scientifiques et crée la Société royale de géographie en 1830. Il a laissé entre autres les relations de ses voyages en Chine (1804), en Afrique du Sud (1801-1804), d'expéditions dans les régions arctiques (1846), une autobiographie (1847), une Vie de Lord Macartney (1807) et de Lord Howe (1838), ainsi que le précieux documentaire sur Les Mutins du Bounty (1831). Sir John Barrow est mort à Londres en 1848.
Nos aventuriers sont les humanistes. Leur quête : retrouver la culture antique perdue. En restaurant sa mémoire, ils fondèrent - souvent au péril de leur vie - une civilisation de la libre pensée, la nôtre. Ils s'engagèrent dans tous les domaines de la vie sociale, depuis la peinture jusqu'aux droits des colonisés, en passant par le théâtre, l'astronomie et la religion. Nous avons beaucoup à apprendre d'eux, en un temps où la liberté d'expression est à nouveau menacée. Jean-Christophe Saladin raconte les aventures de ces hommes et de ces femmes de la Renaissance qui surent puiser dans les immenses richesses occultées du passé pour construire leur avenir.
Succédant à la « tyrannie » du Moyen Âge et précédant un XVIIe siècle de régression, le XVIe siècle fait figure de véritable balise pour l'historiographie française, faisant naître de nouvelles façons de penser et d'écrire l'histoire.
Pour l'expliquer, Denis Crouzet montre que la Renaissance fut, dans la gestation de l'écriture de l'historien Jules Michelet qui, le premier, lui donna ses lettres de noblesse, un vecteur d'une « modernité » promouvant des idées de liberté et de fraternité face aux atrocités et aux violences confessionnelles. C'est-à-dire que le XVIe siècle, cette époque où les hommes, n'acceptant plus leur monde, ont entrepris de le refonder, et où est apparu un héros constitutif d'une mythologie républicaine, le peuple, eut pour Michelet un sens moral et politique qui le dépassait.
Face à l'échec de la Révolution et des révolutions du XIXe siècle dont il est le contemporain, la Renaissance devient un bouclier opposé au pessimisme d'une humanité en perte d'héroïsme, qui permet non seulement à Michelet de conjurer par son écriture une part d'obscurité qui l'habiterait - la mort de son frère qui aurait ferait de lui un enfant de remplacement -, mais aussi d'affirmer que, malgré les peurs qui hantent le passé des hommes, les forces de vie et de liberté demeurent latentes et prêtes à être réactivées. Dès lors, l'historien peut écrire qu'un avenir positif attend les hommes et l'histoire devient une pédagogie éthique de l'espérance.
Ce livre raconte plusieurs histoires en une. D'une part, celle d'une des académies les plus originales et les plus productives de la fin de la Renaissance florentine, l'académie des Alterati (1569-ca. 1630). D'autre part, celle d'un groupe social restreint, constitué de quelques dizaines de jeunes patriciens florentins que le pouvoir médicéen ne voyait pas d'un bon oeil parce que leurs ancêtres avaient lutté pour maintenir la République oligarchique. Ces jeunes nobles firent de leur académie un lieu où occuper leurs loisirs et partager leurs plaisirs - artistiques et autres -, mais aussi un collectif où travailler ensemble à leur intégration dans la société de cour médicéenne.
En troisième lieu, ce livre raconte l'histoire d'un corpus de documents, aujourd'hui dispersé, mais qui constituait jadis le fondement de toutes les activités des « Altérés ». Ces milliers de folios de documents, pour l'essentiel restés à jamais manuscrits - et très largement inexplorés - contiennent des discours académiques, des lettres, des registres d'activité, des dialogues, des poèmes collectivement corrigés, etc. Leur analyse permet de suivre au jour le jour les activités des Alterati pendant près de six décennies, et d'examiner, à travers la forme matérielle que prirent leurs travaux, comment émergèrent en leur sein, au fil de leurs débats, des horizons intellectuels collectifs.
Par l'entrelacement constant de ces trois histoires, ce livre en raconte enfin une quatrième : celle des actions, activités et discours qui, au sein de l'académie des Alterati, ont participé à la constitution de l'esthétique en savoir (et en savoir-faire) d'un type nouveau. À travers le cas des Alterati, ce livre pose ainsi la question de la formalisation des savoirs et pratiques esthétiques qui sont aujourd'hui les nôtres - et celle des liens entre leur émergence et la montée en puissance de l'autoritarisme politique moderne, au sein des aristocraties européennes de la première modernité.
Peu de livres ont eu une importance historique aussi grande, et une postérité aussi variée, que ces « Réflexions », présentées ici dans une traduction nouvelle. OEuvre de circonstance, elle est très vite au centre des polémiques de l'époque révolutionnaire et, au-delà, elle inspire toutes les grandes critiques de la philosophie du XVIIe siècle : du conservatisme anglais au romantisme allemand et au traditionalisme des contre-révolutionnaires français.
Libéral anglais, que tout semblait disposer à accueillir favorablement la Révolution, Burke, dès novembre 1790, prévoit, comme des conséquences inéluctables, la déposition du roi sinon son exécution, et la dictature militaire. La Terreur et la guerre ne feront que confirmer ses premières analyses, comme le montrent, avec une superbe éloquence, les textes qu'il consacra ensuite, jusqu'à sa mort en 1797, aux événements de France, et dont un choix abondant complète la présente édition.
Traduction de Pierre Andler ; présentation de Philippe Raynaud ; annotation d'Alfred Fierro et de Georges Liébert.
Edmund Burke (1729-1797), homme politique et philosophe anglais d'origine irlandaise, a longtemps été député à la Chambre des Communes comme membre du parti whig. Il est resté célèbre pour le soutien qu'il a apporté aux colonies d'Amérique du Nord lors de leur lutte pour l'indépendance, ainsi que pour sa ferme opposition à la Révolution française qui fit de lui l'un des chefs de file de la faction conservatrice au sein de son parti.
Traduite par Claude Laurens avec une courte préface de Pierre Laurens, la fable politique qu'on va lire dans cette nouvelle issue, remaniée pour adhérer à l'édition la plus récente du texte latin, est à ranger dans la bibliothèque aux côtés des chefs-d'oeuvre de Swift, de Voltaire et de George Orwell.
Momus, personnage de la mythologie, mis en scène par Lucien comme le dieu de la critique, devient, entre les mains d'Alberti, qui fait de lui par deux fois une victime injustement persécutée, le premier immoraliste de la littérature moderne. L'exil parmi les hommes aiguise son esprit caustique, le malheur lui enseigne à masquer son caractère, au point que le dieu du franc-parler devient, au rebours de sa nature, le virtuose, mieux : le théoricien de la simulation et de la dissimulation, tel un ingénieux Ulysse égaré dans les cours. Mais surtout, à travers les mésaventures qui le ballottent du ciel à la terre, de la société humaine au parlement de l'univers, il est à chaque instant et partout, comme plus tard le Neveu de Rameau, le génie de la provocation, le grain de levain qui démasque les faiblesses et les hypocrisies, bouscule les idées reçues, désacralise les puissances établies.
Mêlant systématiquement le rire au sérieux, irrigués continuellement par la veine imaginative, portés par une phrase d'une incroyable agilité, les épisodes se succèdent dans un rythme effréné, alternant paradoxes éblouissants, pages d'un comique bouffon et osé autant que profond et inventions poétiques. Un régal.
Architecte, peintre (et auteur des deux premiers traités modernes d'architecture et de peinture), ingénieur, humaniste, moraliste, écrivain, Alberti (1404-1472) fut, avant Léonard de Vinci, le premier exemple de l'homme « universel », génial et inclassable.
Témoin de l'évolution humaine et culturelle de La Réunion, Le Domaine du Grand Hazier a parcouru les siècles au travers d'une histoire riche et variée, de ses nombreux propriétaires et de la diversi¬fication de ses cultures que ses habitants ont su adapter au gré des époques, de la demande et de l'économie locale. De Jean Julien à la famille Chassagne, de la dynastie Panon aux familles Caradec et Nas de Tourris, de nombreuses ¬ figures emblématiques du peuplement de La Réunion ont su exploiter ce grand domaine pour lui donner ses lettres de noblesse que l'on connait aujourd'hui. Cette habitation créole ne serait rien si on omettait de citer les très nombreux esclaves et engagés qui ont participé à leur façon à cette réussite.
Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.
De ce pays si proche et en même temps si différent, les voyageurs français du XVIe au XVIIIe siècle ont laissé, à travers leurs récits et leur correspondance, de nombreux témoignages. Tous disent avec force la beauté et la magnificence des paysages, des villes et des oeuvres d'art.
Mais seuls quelques-uns parlent des habitants, ces Italiens des temps baroques tels qu'ils les ont vus, approchés, fréquentés ; c'est donc à eux que s'attache cet ouvrage. Parce que ce sont les hommes et les portraits qu'ils en brossent, qui rendent si colorés les textes de ces voyageurs. Au-delà des stéréotypes et des préjugés, au-delà des conventions propres à ces récits, une Italie extrêmement vivante naît ainsi sous nos yeux. Des femmes et des hommes à la fois lointains et étonnamment familiers dans leur façon d'être et de vivre, piquent la curiosité des auteurs, qui nous les rapportent dans des narrations où le pittoresque, le trait littéraire et l'humour ne sont jamais absents. La vision globale d'un peuple est restituée, dans ses aspects physiques et son habillement, ses croyances et ses superstitions, comme dans la place si particulière de la femme au sein de la société. Défilent devant nous autant leurs coutumes - parfois bien surprenantes - que leur cuisine et leur langue ou, tout bonnement, leur amour de la vie dans ce qu'elle a de plus intense et de plus léger. Ils sont là, ces Italiens, plus que jamais présents - plus que jamais attachants.
Docteur en Histoire de l'Art moderne (Paris IV Sorbonne) Laurent Bolard est spécialiste de la peinture italienne de la Renaissance et du XVIIe siècle. Auteur de nombreuses études sur l'Italie renaissante et baroque, il a publié un Caravage chez Fayard, et un Voyage des peintres en Italie au XVIIe siècle aux Belles Lettres.
Cet ouvrage, enraciné dans le contexte de la société réunionnaise, met en oeuvre une approche psychanalytique à partir du « démounaz », en s'appuyant sur la profondeur historique de l'esclavage. Des hommes, des femmes et des enfants ont été réduits à l'état de chose, d'objet, par la voie d'une vaste entreprise de démolition du sujet qui visait à effacer leurs histoires, leur nom et leur condition même d'être humain. Pour s'extraire des multiples formes de destruction, de réification, ils ont alors déployé des stratégies inédites : musique, danse, ruse, rites cultuels, marronnage, etc. Cette rébellion de l'être constitue le socle d'une créativité qui leur a permis de réinventer le lien social, selon des modalités singulières et originales.
Entre 1391 et 1425, trois femmes sont décapitées sur ordre de leurs maris. Épouses de trois des plus grands seigneurs de l'Italie de la Renaissance - Mantoue, Milan, Ferrare -, Agnese Visconti, Beatrice de Tende et Parisina Malatesta sont exécutées pour cause d'adultère. Pourtant, aucune femme infidèle ne subissait alors un tel châtiment et, autre étrangeté, loin de dissimuler ces mises à mort, les trois seigneurs les rendent au contraire publiques. Il y a là une énigme historique qu'Élisabeth Crouzet-Pavan et Jean-Claude Maire Vigueur entendent bien élucider. Ces trois femmes ont certes trahi les liens du mariage, mais elles sont surtout coupables d'avoir tenté de prendre une part active aux grandes innovations politiques et culturelles de leur temps. Elles sont châtiées pour avoir voulu transgresser le statut traditionnellement effacé de « l'épouse du seigneur. En les faisant périr, leurs maris réaffirment symboliquement leur pouvoir de princes.Cette enquête passionnante sur les moeurs, les pratiques culturelles et l'autorité des seigneuries florissantes de la Renaissance italienne est aussi une contribution importante à l'histoire des femmes. C'est l'Italie de la première Renaissance, l'Italie des violences des hommes, mais aussi de l'humanisme naissant et de la passion pour les arts, qui est au coeur de ces trois tragédies féminines.
Secrétaire, secrétariat : une figure aujourd'hui omniprésente, une présence qui va de soi. Il fut un temps où le secrétaire était un domestique, un intime, gardien des secrets et des affaires privées de son maître.L'enquête de Nicolas Schapira met en lumière l'apparition de ce couple, où l'un décide tandis que l'autre conseille, écrit, et tient mémoire. C'est entre Renaissance et âge des Lumières, au moment où le papier devient le support de toute décision, que paraît ce personnage nouveau, pouvant être simple scribe comme conseiller des princes, reconnu pour son expertise. Quelle que soit sa condition, le secrétaire est une silhouette de l'ombre : des traités sont écrits pour louer son action et ses compétences, mais les contemporains dénoncent son influence excessive et son ubiquité.Associant les méthodes de l'histoire et des sciences sociales, ce livre raconte l'ascension d'un groupe qui ne s'identifiait ni à un métier ni à un statut, mais dont le pouvoir s'accrut à mesure que l'État se construisait sous l'Ancien Régime et qu'il pénétrait progressivement toutes les strates de l'administration, jusqu'à nos jours.
Agrégé et docteur en histoire, Nicolas Schapira est professeur d'histoire moderne à l'Université Paris Ouest Nanterre. Il est l'auteur, notamment, de Un professionnel des lettres au XVIIe siècle. Valentin Conrart : une histoire sociale, Champ Vallon, 2003 ; et (en collaboration) de Histoire Littérature Témoignage. Écrire les malheurs du temps, Gallimard, 2009.
À la différence des pensées antiques qui, invitant à se connaître soi-même, détachent l'âme du corps, la pensée chrétienne élabore une conception du corps étroitement solidaire de l'âme : celle-ci n'est tout à fait elle-même qu'unie au corps qu'elle anime. Or la médecine sait à quel point la vie intérieure du corps nous échappe. Si la Renaissance est ardemment attentive à l'anatomie, de grandes pensées expriment de fortes réserves sur la validité de ce savoir qui pourrait bien n'être qu'un trompe-l'oeil. Plus généralement comment définir le rapport de l'âme et du corps ? Les métaphores qui tentent de le décrire sont aussi nombreuses qu'imparfaites, comme est vif l'intérêt pour ces individus qui vivent ce rapport dans l'incertitude, l'instabilité ou l'inquiétude : le lycanthrope, qui, comme on dit alors, « se met en loup », l'ensorcelé, le fou. À défaut de pouvoir scruter l'intimité des corps, d'être en état d'en franchir la clôture, il faut mettre en place des procédures indirectes d'observation, édifier un complexe savoir conjectural qui sache repérer et croiser les signes. Nous n'avons pas complètement renoncé à ces représentations.
J. B. Varéliaud, sur le plan du combat de cavalerie, a multiplié les exploits au point que seuls peuvent lui être comparés les plus grands cavaliers de l'Empire : Murat, Lasalle et quelques autres. Pourtant, il est inconnu, n'ayant atteint que le grade de colonel. Varéliaud était un véritable « Houzard » (forme d'origine du mot Hussard encore couramment employée sous l'Empire) ; l'avancement, la carrière ne l'intéressaient guère. Ce qu'il cherchait, c'était l'aventure. Ce tome nous fait découvrir la période qui va de 1792 à 1806, où Jean-Baptiste Varéliaud, appartint sans interruption au 9e régiment de Hussards et où il accomplit ses exploits les plus fameux, qui firent sa gloire et qui ne sont pas étrangers même à la réputation acquise par ce régiment pendant la Révolution et l'Empire.
Grâce à l'exploitation d'archives inédites, la biographie de Mgr Jean-Baptiste d'Argentré (1720-1805) nous entraîne dans l'histoire de Normandie, de Bretagne, du Limousin, de la cour de Versailles, de l'éducation des princes, de la Révolution, de l'Émigration. Évêque de Séez, il côtoie quatre rois et reines de France, Turgot, Loménie de Brienne. Élu maire de Séez, la Constitution civile du clergé le contraint à s'exiler. Ses principes lui dictent de refuser l'abdication de son siège épiscopal demandée pour mettre en oeuvre le Concordat. Répugnant cependant au schisme de la Petite-Eglise, il ordonne à son diocèse d'obéir en tout à son successeur nommé par Pie VII. Il s'éteint après treize ans d'exil en présence de son frère Louis-Charles, évêque de Limoges.
Tout au long du XVIIe siècle les monarchies de France et d'Espagne s'affrontent pour affirmer leur hégémonie en Europe. De nouvelles formes de lutte s'affirment alors : propagande, aide économique aux alliés et alliances d'intérêt politique. C'est ainsi que la révolte de la Catalogne contre l'Espagne de Philippe IV devient une occasion propre à servir les desseins de la France, Louis XIII puis Louis XIV trouvant des alliés chez les Catalans.
La paix établie entre les deux puissances par la signature du traité des Pyrénées (1659), le contrôle des frontières devient pour le jeune roi Louis XIV un moyen de contester la suprématie du roi d'Espagne : la France reconnaît l'appartenance de la Catalogne au royaume d'Espagne mais incorpore le Roussillon et une partie de la Cerdagne.
Émerge un personnage essentiel, le juriste Ramon Trobat, natif de Barcelone. Homme clé pendant les négociations du Traité des Pyrénées, il devient indispensable à Louis XIV dans sa politique vis-à-vis des Habsbourg d'Espagne. Nommé avocat du conseil souverain puis intendant de la nouvelle province du Roussillon, Ramon Trobat est un ami du ministre Louvois. Grand connaisseur des réseaux politiques et sociaux en Catalogne, il est à l'origine du projet d'une Catalogne française.
Dans sa croisade contre les privilèges, la Révolution française n'a pas épargné le clergé. Et tandis que ses éléments les plus radicaux ont tenté, sans y réussir, d'éradiquer toute velléité de culte, elle s'est approprié les biens, mobiliers et immobiliers, de l'Église déchue, à commencer par les églises. Certaines ont survécu après bien des péripéties, d'autres ont disparu purement et simplement. Le propos de ce livre est d'illustrer cette période tourmentée de notre histoire, en évoquant le destin contrasté de six églises parisiennes toutes situées sur la rive gauche, autour de Saint-Germain-des-Prés.
Cet ouvrage est à la fois une contribution à l'histoire maritime et à l'histoire antillaise. En s'intéressant aux navigations militaires aux Antilles, les chercheurs réunis ici proposent autant un état des lieux des recherches qu'une nouvelle vision de la présence navale européenne dans l'aire caribéenne. À travers la présence des flottes de guerre ou des unités navales isolées dans les eaux antillaises les auteurs s'intéressent aussi bien aux fonctions des navires qu'aux différents acteurs administrateurs engagés dans le jeu géo-stratégique complexe que se livrent les grands empires dans la Caraïbe au XVIIe, au XVIIIe et au début du XIXe siècles.
En quatre siècles la France a contrôlé, plus ou moins complètement, un territoire équivalent à l'ex-URSS. Tout commence avec François Ier, qui a ouvert à la France l'Océan, jusqu'alors réservé aux seuls Portugal et Espagne depuis la bulle Inter coetera d'Alexandre VI qui partageait les terres à découvrir (1493). 1533 pourrait alors être la date de naissance de la grande aventure coloniale française que nous retrace ici Xavier Yacono.